Cerisiers en fleurs
Damien Hirst à la Fondation Cartier
Artiste : Damien Hirst
Titre : Cerisiers en fleurs
Lieu : Fondation Cartier pour l’art contemporain
Dates : du 6 juillet 2021 au 2 janvier 2022
Chef de file des Young British Artists, qui se distinguent par leur goût de l’expérimentation, allant parfois jusqu’au scandale, Damien Hirst reste, à 56 ans, un gamin rebelle. Celui qui s’est fait connaître avec le requin-tigre figé dans le formol, devenu une icône contestataire des années 80, répond aujourd’hui à l’invitation de la Fondation Cartier pour l’art contemporain avec une trentaine de tableaux grand format d’arbres en fleurs.
Il s’approprie sans complexe ce sujet traditionnel, très populaire, et ne cherche pas à le détourner : il traite avec fraîcheur et naturel de la beauté des cerisiers au printemps, pour célébrer la matière et la couleur. L’éclosion se décline, comme les grandes thèmes de la vie : Fantasia Blossom, the Triumph of Death Blossom, Spiritual Day Blossom, Excitement’s Blossom, Ceremonial Blossom…
Deux films prolongent l’expérience : un film documentaire qui nous plonge au cœur de l’atelier londonien de Damien Hirst, et un film 360°, pour se promener en immersion dans l’œuvre en cours de crétion.
Échec et mat, succès et maturité
Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage… Le minimalisme qui a rendu Hirst célèbre, et qu’il a exprimé avec de plus en plus de précision au long de sa carrière, n’était pour lui qu’un outil, qui lui permet à présent de revenir, plus riche d’expérience, à d’autres moyens d’expression. Il déclare : « Les Cerisiers en Fleurs parlent de beauté, de vie et de mort. Elles sont excessives, presque vulgaires. […] Elles sont ornementales mais peintes d’après nature. […] Les Cerisiers en Fleurs sont tape-à l’œil, désordonnées et fragiles, et grâces à elles, je me suis éloigné du minimalisme pour revenir avec enthousiasme à la spontanéité du geste pictural. »
Sa notoriété lui permet à présent de flirter avec le tabou artistique de la décoration, sans se contenter de faire des œuvres ornementales. Il reconnaît s’être éloigné de la peinture, pourtant son medium de prédilection, dans sa jeunesse, parce qu’« en tant que jeune artiste, on est nécessairement influencé par les tendances du moment, et dans les années 1980 la peinture n’était pas dans l’air du temps.»
N’ayant aujourd’hui plus rien à prouver, il s’’affranchit des genres et des codes : sa technique mêlant épaisses touches de peinture et légères projection tient du pointillisme autant que de l’action painting. Son usage de couleurs vives, joyeuses, quelquefois pastel, toujours contrastées, n’a pas souci figuratif, sans pour autant se rattacher au fauvisme. Il trace sa route entre les courants, personnelle et assumée.
Le simple, le beau et le facile
Lorsqu’un critique d’art comparait ses œuvres à des motifs pour rideaux, Damien Hirst avait rétorqué avec les Visual Candy Paintings (depuis 1993), et plus récemment les Colour Space Paintings (depuis 2016) et les Veil Paintings (depuis 2018), variations autour de couleurs acidulées ou scintillantes, superposées en couches épaisses ou projetées en goutelettes, qui célèbrent la dimension matérielle et ornementale, visuellement riche et plaisante, de l’art.
Il réconcilie l’art contemporain avec « l’éphémère beauté d’un arbre en fleurs dans un ciel sans nuages ». Ce mouvement spontané de l’artiste rejoint le mouvement spontané du spectateur, attiré par ces tableaux volontairement tape-à-l’œil, enthousiastes sans être raccoleurs, qui n’ont que la prétention de plaire.
Les films prolongent cette expérience, donnant généreusement à voir, sans barrière, le travail de création dans tout ce qu’il a de plus matériel, permettant de se promener, presque de toucher les pinceaux, les toiles et les pots de peinture.
À retrouver jusqu’au 2 janvier 2022 à la Fondation Cartier pour l’art contemporain, à Paris.